Ils sont partis sans fracas, mais pas sans bagages. Le 30 août 2023, le clan Bongo tombait officiellement de son trône, délogé par le général Brice Clotaire Oligui Nguema dans un coup d’État au goût étrange : ni sang, ni larme, mais une standing ovation dans les rues. On aurait dit une finale de Coupe d’Afrique remportée par le peuple.
Mais pendant que Libreville dansait, Ali Bongo Ondimba, lui, patientait. Puis disparaissait. Et aujourd’hui, le revoilà, non pas à l’écran, mais dans les coulisses. Plus précisément, dans le très feutré quartier de Mayfair, à Londres, où la dynastie déchue reprend des couleurs, loin de la poussière du boulevard Triomphal.
Exit le pouvoir. Bonjour les manœuvres
Ali Bongo, désormais exilé de fait mais pas d’ambition, a retrouvé son épouse Sylvia et leur fils Noureddin dans ce qui pourrait passer pour une villégiature de luxe. Sauf que derrière les rideaux épais et les murs insonorisés de leur résidence, ce n’est pas l’heure du thé, mais celle des tractations.
Les trois ont d’abord fait une escale à Luanda, grâce à l'intervention du très diplomate président angolais João Lourenço qui, visiblement, distribue les sauf-conduits plus vite que les visas. Puis Noureddin a fait une halte stratégique à Paris, là où les grandes histoires africaines se racontent toujours mieux sous les dorures de la République.
Au programme : Pascaline, Omar Denis Junior… et peut-être Frédéric Bongo.
Une réunion de famille ? Que nenni. Une tentative de réanimation d’un appareil politique moribond, voilà le vrai menu. À Paris, Noureddin a rencontré sa tante Pascaline Bongo, toujours aussi énigmatique, et son cousin Omar Denis Junior Bongo, devenu, selon des indiscrétions, Monsieur Raccords du clan éclaté.
Mais le scoop n’est pas là. Il est dans l’idée que Noureddin pourrait même se réconcilier avec Frédéric Bongo, l’ancien tout-puissant chef des services spéciaux, exilé en France, et évincé un jour… par Oligui Nguema lui-même. Ah, l’histoire a décidément de l’humour.
Car pendant que le général-président parade à l’international, qu’il promet élections, réformes et vertus, les anciens maîtres de Libreville tricotent patiemment dans l’ombre. Une ombre moquettée, parfumée, londonienne. Une ombre où les alliances se dénouent et se reforment, à l’ancienne. Un peu de Sassou ici, un peu d’Élysée là, quelques réseaux de la Françafrique en voient de reconversion, et le tour est (presque) joué.
Arsenal, thé noir et reconquête
Ali Bongo, nous dit-on, savoure sa passion pour Arsenal, entre deux réunions familiales. On le croyait affaibli, il se révèle stratège. Pendant que certains s’imaginent qu’il se contente de suivre la Premier League, c’est en réalité un jeu de Ligue des Champions qui se joue : recomposer le clan, redorer le blason, et surtout... ne pas disparaître de la carte.
L’ironie est saisissante : c’est peut-être à Londres, et non à Libreville, que se trame la prochaine saison politique du Gabon. Dans les salons feutrés, les exilés bavardent, négocient, et surtout… préparent un retour. Pas nécessairement au pouvoir, mais à l’influence. Ce qui, en Afrique centrale, vaut souvent bien plus qu’une élection. Oligui peut bien tenir la scène, les Bongo ont repris les loges.
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