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Bilie-By-Nze à Pleine-Orety : du candidat malheureux au Zorro du droit des sans-abris

IMG Alain-Claude Bilie-By-Nze, un geste noble ou une opération de rattrapage politico-moral ?

Le décor était digne d’un théâtre post-catastrophe : des tôles froissées par le bulldozer, des enfants aux regards perdus, des femmes résignées sous le soleil de juin, et au milieu de ce chaos urbain… une silhouette familière. Alain-Claude Bilie-By-Nze, ancien Premier ministre, ancien candidat à la présidentielle, ancien tout-court mais toujours là où les caméras pourraient revenir a effectué une visite inattendue au quartier Plaine-Orety, auprès des victimes de déguerpissements. Mieux : il leur offre… trois avocats. Ni pain, ni eau, ni abri, mais trois avocats. Un geste noble ? Ou une opération de rattrapage politico-moral ? C’est selon.

 

D’aucuns sur les réseaux sociaux parlent d’un « acte de compassion ». D’autres, plus lucides, évoquent une farce de la 5e République : l’homme qui a connu le dossier, qui était assis à la table des décisions, revient en justicier des rues après avoir quitté le trône. Un médecin après la mort, avec une trousse de secours pleine de promesses juridiques.

 

L’éléphant dans la pièce ? Son passé.

Rappelons-le : Alain-Claude Bilie-By-Nze n’est pas un simple citoyen alarmé par la détresse sociale. Il a été aux manettes du pouvoir, au sommet de la pyramide décisionnelle, Premier ministre entre 2022 et 2023. À cette époque, les déguerpissements ne sont pas tombés du ciel. La politique d’urbanisme autoritaire, les expulsions « pour cause d’embellissement » et les décisions sans mesures sociales d’accompagnement ont germé sous des gouvernements dont il était le pivot.

 

Alors pourquoi ce retour théâtral, façon Zorro du droit des sans-abris ? Serait-ce la fièvre de la rédemption post-électorale ? Le besoin de se repositionner dans le paysage politique, après une présidentielle qui l’a vu sortir sans gloire ? Ou simplement le vieux réflexe d’un homme politique qui sait qu’un bon coup médiatique, sur fond de misère, peut valoir plus qu’un programme électoral ?

 

Une initiative sans suites ?

« Je ne vous promets pas de l’eau ou de la nourriture, mais je vous promets de faire entendre vos droits », a-t-il déclaré. Voilà qui a le mérite d’être clair. Pas de solutions immédiates à la crise humanitaire qu’il découvre soudainement, mais un recours judiciaire dans un pays où les procédures prennent souvent des années, et où l’issue est rarement favorable aux plus vulnérables.

 

Le cynisme ne serait pas complet sans rappeler que les trois avocats en question, aussi compétents soient-ils, ne peuvent réparer ce que la violence institutionnelle a détruit : des vies, des foyers, des repères. L’État déguerpit, Bilie-By-Nze « réguerpit » du verbe tout nouveau qui signifie : revenir politiquement sur les ruines de sa propre gouvernance.

 

En clair : Ce geste, s’il soulage symboliquement quelques consciences, ne saurait faire oublier les responsabilités passées. On ne construit pas une crédibilité politique sur les gravats d’une injustice qu’on a laissée prospérer. Il faut plus qu’un coup de com’ en plein quartier sinistré pour convaincre les Gabonais que le changement viendra d’un ancien acteur du système.

 

En attendant, les populations, elles, n’ont toujours ni toit, ni eau, ni pain. Mais elles ont trois avocats. Et Bilie-By-Nze a une nouvelle image à vendre. Chacun y trouve peut-être son compte sauf la justice.

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